Note : 4.25 / 5
Synopsis :
Il y a 40 hivers, les Dieux du Northland l’ont puni en
faisant de lui à la naissance un "skraëling", littéralement "un homme
laid", un infirme. Différent parce que né avec un seul pied. Son père aurait dû
s’en débarrasser pour éviter que sa maison soit marquée du sceau de la
malédiction. Mais il n’a pas pu. Et en une ultime ironie, il lui a donné
le nom d’Asgard, nom du royaume que les Dieux lui avaient
refusé.
On le surnomme aujourd’hui "Pied-de-Fer". Et ce matin-là, il
recueille sur le rivage Sieglind, une jeune esclave affranchie et à
demi-consciente, la seule survivante du naufrage d’un petit navire de
pêche. Comme bien d’autres avant lui, l’équipage vient de faire une
funeste rencontre : un Krökken, un monstre marin sorti des enfers. La
bestiole immonde fait des ravages en décimant la population du village
de Dyflin ou en empêchant les drakkars royaux de prendre la mer pour
livrer combats et rapporter leur butin.
Asgard n’était pas là par
hasard. Il est en effet un chasseur de monstres réputé. En
raccompagnant la jeune fille à Dyflin, il propose d’ailleurs aux
villageois de ramener la tête du monstre contre 1000 talents d’argent.
La somme est rondelette. Kristen, du clan des Aardvern, lui offre pour
tout paiement ses deux bras et son navire, le dernier du village. Svenn
Larssen, le scalde, propose quant à lui ses talents d’ancien marin
expérimenté. "Pied-de-fer" s’apprête à refuser ses offres, quand un
valeureux guerrier de la garde royale propose sa vaillance et 2000
talents d’argent. Après quelques préparatifs, l’équipage prend la mer.
A la barre "d’Asgard", on retrouve Xavier Dorison ("Long John Silver", "Le Troisième Testament", "Sanctuaire",…) au scénario et Ralph Meyer ("Berceuse Assassine", "Ian") au dessin. Prévu en deux tomes aux éditions Dargaud, "Asgard" revoit donc le duo Dorison / Meyer se reformer depuis leur association sur la collection "XIII Mystery" qu’ils avaient entamée avec le premier album "La mangouste". C’est donc avec une certaine excitation qu’on les retrouve pour cette histoire nordique.
Au centre du récit, un quadra maudit (en
raison d’une infirmité congénitale), ex-guerrier, solitaire et chasseur
réputé de grosses vilaines bestioles. Pour faire craquer sa grosse
carapace, une orpheline animée d’une redoutable énergie. Tout autour
s’anime alors, avec une justesse rigoureuse, un univers viking dont les
contours esquissés dans ce premier tome rappellent ceux de "Thorgal", ni plus ni moins.
Un peu de vocabulaire viking, un peu de folklore nordique, un dessin
mature et voilà une bonne histoire de viking qui n’a rien de banale, même si elle reste assez classique.
Traitée simplement, on ressent tout le poids des histoires personnelles
des personnages et en particulier le lien qui va se tisser entre
Sieglind, orpheline de parents esclaves et Asgard le "skraëling". Et si
chacun a beaucoup à gagner à s’embarquer dans cette aventure, ils ont
aussi beaucoup à perdre, et en particulier la vie.
Avec Asgard, on voit tout de suite que Dorison veut se concentrer sur la
chasse épique de son petit groupe et décide pour se faire de tout miser
sur l’efficacité maximum et un rythme soutenu. Tout se met en place
assez vite et, surtout, avec justesse. En ça l’auteur décide d’aller à l’essentiel
en fournissant les informations nécessaires aux lecteurs, sans
s’encombrer de superflu. Ce choix permet de nous faire vivre la tension
présente sur le bateau et de s’assurer que notre concentration est à
100 % là où Dorison veut qu’elle soit.
Cette pratique est assez risquée,
mais au final l’exercice est maîtrisé et rend le tout assez atypique.
On a donc affaire à des planches avares en dialogues, mais diablement
fluides qu’on enchaîne rapidement afin de suivre les mésaventures de
Pied de Fer et sa troupe. Mais voilà, bien que cela soit efficace c’est
peut-être bien là son principal défaut. Le rythme étant si haletant et
rapide qu’on enchaîne un peu trop vite les pages, sans toujours bien
prendre le temps d’observer à leurs justes valeurs les casses de Meyer,
et en peu de temps, on se retrouve déjà à reposer l’album que l’on
vient de dévorer.
Pour autant dédié principalement à
l’aventure et l’action, le récit (prévu en 2 tomes) s’ouvre un large
potentiel. Dorison n’explore en effet que par petites touches
parcimonieuses le profil de son personnage principal en laissant
plusieurs balises qui, exploitées a posteriori, pourraient nous offrir
une série au long court.
Sans entrer trop dans les détails, le scénariste nous présente à la fois
le cadre historique, culturel, environnemental et les personnages qui
peuplent ce monde. À travers la série "Asgard", l’auteur arrive à traiter
de vastes thèmes comme celui de la lutte d’un homme contre les dieux,
contre son destin, mais aussi de sa place dans la société et
l’inefficacité de cette dernière à s’adapter aux changements.
Très impressionnant, le dessin de Ralph Meyer nous gratifie de quelques belles cases avec de belles gueules. En
particulier, le personnage d’Asgard exprimant à la fois virilité et
sagesse. On perçoit un homme endurcit par la vie, mais ayant acquis une
certaine expérience issue de ses désillusions et de la connaissance de
la nature humaine.
Meyer arrive à nous proposer une mise en scène qui lui est propre et qui
ne cherche pas à imiter le style d’un autre auteur. Le découpage est
excellent, et rend l’aventure vibrante, énergique, et donne du sens à
l’histoire de chasse. Le trait du dessinateur arrive à la fois à donner de la puissance aux
personnages nordiques durs et massifs que sont les guerriers vikings,
tout en donnant de la finesse et fragilité au personnage de l’innocente
Sieglind.
En ce qui concerne les paysages, Meyer arrive à jouer la carte
du dépaysement en nous offrant des paysages de fjords magnifique, et se
joue de cet effet carte postale, pour faire le contraste avec l’arrivée
de la bête monstrueuse. Chaque planche est vraiment un bonheur pour les
yeux tant le dessin est beau précis et plein de détails. Plus important encore, le trait de
Meyer participe à la fluidité de l’histoire et sert aussi à masquer
l’absence fréquente de texte.
L’idée du mouvement est parfaitement
retranscrite, et la colorisation oscillant entre les gris bleutés, gris
verts et les rouges orangés retranscrivent bien l’aspect glacé et sombre
que l’on peut se faire de cet univers nordique. Ainsi son travail est un
sérieux atout pour la réussite de ce projet. Bref, son talent explose
littéralement et font de cette entame un véritable petit bijou.
En résumé, "Asgard" est une œuvre qui regorge de technicité afin de
livrer au lecteur un résultat accessible, prenant, montrant le niveau de
savoir-faire des deux artistes qui savent très bien ce dont est capable
l’autre. Bien qu’assez classique l’histoire de Pied de fer n’en reste
pas moins efficace, intéressante et est l’une des bonnes surprises
franco-belge de l’année 2012.
"Asgard" est une
fresque épique parmi les vikings ! Une légende que doit affronter un
guerrier maudit des dieux : le terrible serpent-monde, fils
des dieux et incarnation d'une terrible prophétie. On s'attache à ce farouche guerrier qui ne recule devant rien et personne, poursuivant inlassablement sa quête. Les graphismes sont très beaux, réalistes et parés de couleurs vives. Un excellent premier tome !!!
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