Note : 4.5 / 5
Synopsis :
En 1974 à Kinshasa, capitale du Zaïre, eut lieu une rencontre historique
entre les deux poids lourds les plus réputés des Etats-Unis, Muhammad
Ali, alias Cassius Clay, et George Foreman. A trente-deux ans, Ali passe
pour un has-been tandis que Foreman, vingt-cinq ans, est auréolé de ses
victoires sur Frazier et Norton.
Après avoir été déchu de ses droits
pour insoumission (refus de participer à la guerre du Vietnam) pendant
trois ans et demi, Ali avait décidé de reconquérir son titre en 1970. Le
30 octobre 1974, le stade de Kinshasa ouvre ses grilles à 4 heures du
matin.
Critique :
Tous les amateurs de boxe ont en mémoire un combat mythique, peut-être
le plus célèbre de l'histoire des poids lourds : celui qui opposa, en
1974 à Kinshasa, au Zaïre, Muhammad Ali, alias Cassius Clay, prodige
vieillissant (nommé sportif du XXe siècle par une assemblée de journalistes internationaux, précédant Pelé), à George Foreman, jeune bulldozer réputé invincible. Pour
les historiens, ce combat, accompagné d'un concert fleuve de James
Brown, B.B. King et Miriam Makeba, marque une date essentielle dans
l'histoire de la communauté afro-américaine : la prise de conscience de
ses racines.
"When we were Kings" est un film documentaire sur L’Événement sportif de l'année 1974. Pour cela, Leon Gast a utilisé des images et de témoignages d'époques. L'événement est LE combat de boxe du siècle
orchestré autour de la communauté noire américaine.
Cette rencontre se déroule dans un pays renversé par un jeune général, un "certain" Mobutu dans un "superbe costume léopard". Boxeurs, artistes sont venus
accompagnés par les médias. On commence donc par un match de conférences
de presse, avec un Ali déchaîné, véritable comédien et un Foreman plus discret et moins charismatique.
Pour Leon Gast, qui filma l'événement, c'est un
invraisemblable marathon de vingt-deux ans, commencé dans la souffrance,
terminé dans le bonheur, avec l'Oscar du meilleur documentaire l'année de sa sortie (1996).
Maintenant, "When we were kings" est d'abord le portrait d'un grand
personnage de cinéma. Un homme capable d'introduire dans sa vie, et
dans ce documentaire, un rêve de fiction, en endossant tous les rôles :
boxeur, bien sûr il est même l'un des plus grands de tous les temps ,
Muhammad Ali est aussi histrion, poète, meneur d'hommes, leader
charismatique...
Mais, avant tout, scénariste inspiré : cette histoire, son histoire, il
l'écrit et la maîtrise de bout en bout. Il est le deus ex machina de ce
film.
C'est comme s'il en avait pris les commandes. Il se joue de la caméra
comme s'il se tenait entre les cordes, avec un sens très sûr de
l'esquive et du harcèlement, des allers-retours saisissants entre le
calcul et l'improvisation, une puissance magnétique de démolisseur qui
se régale du moindre espace et pose méthodiquement, comme à chaque round
de sa carrière, le sens d'un combat au sens large. "J'ai une mission",
souffle Ali à l'équipe qui le suit pas à pas dans sa retraite de
Kinshasa où il est accueilli en prophète. "Au diable l'Amérique ! Après 4
000 ans d'esclavage, je rentre chez moi, je suis de retour en Afrique". "Je vais combattre pour mon peuple, lance-t-il aussi. Pour ceux qui
dorment sur le pavé, pour les camés, pour les prostitués".
Dès l'instant où il pose le pied sur le sol africain, dans le Zaïre de
Mobutu, l'ancien champion du monde, converti à l'islam, condamné à cinq
ans de prison pour avoir refusé de servir au Vietnam, comprend qu'il
tient le rôle de sa vie, sa grande histoire. "La démission de Nixon a
surpris mais... attendez que j'écrase Foreman", lâche-t-il, survolté,
presque possédé.
Ces micros qui se tendent vers lui, ces caméras qui le suivent partout,
Muhammad Ali les met à son service. Bête de scène avant d'être un fauve
sur le ring, il lance ses répliques comme des directs et trouve des images
cocasses. Autant de trouvailles
sûrement travaillées, mais auxquelles il sait donner toute l'apparence
du spontané.
Le combat de Kinshasa c'est toute la fureur retenue, la colère et en
même temps la certitude d'un homme bafoué qui va gagner le combat de sa
vie. D'une scène à l'autre, Ali prend l'ascendant sur l'invincible Foreman,
ravalé au rang de vilain, falot, Noir coupé des Noirs et que l'Afrique
prend en grippe sur l'air de "Ali Bomayé !" ("Ali détruis-le !"). "Qui est-il ?"
demande Ali dans son autobiographie. "Il est l'Amérique blanche, la
chrétienté, le drapeau". "When We Were Kings" nous mène ainsi au combat
sans faux rythme en s'appuyant sur les souvenirs
des témoins de l'époque.
Le génie d'Ali devient éclatant lorsqu'il comprend qu'il peut gagner en
donnant à son combat l'allure d'une croisade. Objectivement plus faible
que son adversaire, il le démolit psychologiquement bien avant de monter
sur le ring, mettant à profit le report du match (pour une blessure à l'entraînement de Foreman) pour rallier le
pays, mais aussi tous les Noirs d'Afrique et d'Amérique, à sa cause.
On n'est pas seulement fasciné. On est d'abord ému, parce qu'on devine
Ali ravagé par la peur. Derrière le surhomme, il y a l'humanité de celui
qui se met au niveau des autres. Du coup, il force chacun, son adversaire mais
aussi les témoins de l'événement que l'on retrouve aujourd'hui , à se
situer par rapport à lui : Muhammad Ali devient le film à lui tout
seul.
En d'autres termes, "When We Were Kings" est un documentaire monté avec du suspens, un final inattendu et un véritable
scénario, où les personnages sont riches en couleur (pas uniquement les
vedettes, puisque les entraîneurs, le manager de L'événement, etc. valent
également le détour). Le film va bien plus loin qu'un simple match de
boxe, il offre une vision des années 70 when we were kings.
Aujourd'hui, personne ne porte une communauté comme a pu le faire Ali, quand les rois n'étaient pas les rois du business, bien moins glorieux !!!
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