dimanche 4 novembre 2012

Livre (Jeunesse) - Le combat d'hiver de Jean-claude Mourlevat

Le Combat d'Hiver
                          de Jean-Claude Mourlevat

Note : 4 / 5

Synopsis : 
Quatre orphelins, Miléna, Helen, Milos et Bartolomeo, prennent conscience de leur identité. Ils sont les enfants de résistants à la Phalange. Ce groupe, implanté dans un monde dont on ignore le nom gouverne avec tyrannie depuis une quinzaine d'années.
Le combat d'hiver est donc celui de nos quatre adolescents, évadés de leur orphelinat-prison, pour reprendre la lutte perdue par leurs parents, quinze ans plus tôt. Ont-ils la moindre chance d'échapper aux terribles "hommes-chiens" lancés à leur poursuite dans les montagnes glacées ? Pourront-ils compter sur l'aide généreuse du "peuple-cheval" ? Survivront-ils à la barbarie des jeux du cirque réinventés par la Phalange ? Leur combat, hymne grandiose au courage et à la liberté, est de ceux qu'on dit perdus d'avance. Et pourtant. 

Critique :
Il est devenu rare en littérature de jeunesse fantastique de trouver un tome unique et autonome, un "one-shot" en quelque sorte. Jean-Claude Mourlevat nous prouve que l’entreprise est encore réalisable, de surcroît avec qualité.
L’histoire sombre, violente souvent, explore un fantastique sans effets faciles, mais à la limite de l’effrayant justement de par sa volonté réaliste. Dès le départ, Jean-Claude Mourlevat réussit à créer un univers un peu trouble et étrange. Les consoleuses, les hommes-chiens, les hommes-loups participent de cette impression. Cependant, il le fait avec un tel réalisme, décrivant un monde qui pourrait être le nôtre (sans l'être vraiment), que cela en est troublant !
On a l'impression de se mouvoir dans un monde gris et triste, flirtant avec ceux décrit par Orwell dans "1984", ou Huxley dans "Le meilleur des mondes" ou bien encore celui de "V pour Vendetta", tout en étant dans un tout autre monde. Un monde avec un orphelinat très particulier digne d'une prison, où des policiers s'aident de mutants mi-chien, mi-homme beaucoup plus féroces que de simples chiens. Mais aussi un monde peuplé d'hommes simples, braves et très forts qui ont de ce fait hérité du nom d'hommes-chevaux. Et puis surtout un monde qui connaît l'horreur des combats d'hiver, ces combats à mort sur le principe des antiques jeux des gladiateurs romains. 
Mourlevat montre, décrit, explique et raconte autour de ça. Il fait le récit de la prise de conscience d'un peuple qui va vers la révolution. Avec lui, on n'a pas le temps de s’ennuyer ! Dès les premières pages, nous sommes plongés dans l’univers de ces adolescents, dans leur internat très sombre ou terreur et angoisse règnent en maître. Le thème principal du livre, bien que déjà vu, est vraiment prenant. Suivre ces quatre adolescents qui reprennent un dur combat mené par leurs parents autrefois est un réel plaisir.
Ainsi, bien que l'histoire soit du vue et du revue donc, elle se veut tout de même passionnante. C'est un peu comme en fantasy où l'auteur fait toujours le récit du bien contre le mal et trouve, pour les plus doués, des variantes. Ici c'est le cas, Mourlevat ne va pas dans l'évidence, il fait vivre ses personnages et n'hésite pas à jouer avec leur vie.
Le narrateur externe cherche à ne privilégier aucun des quatre personnages, s’attardant même sur l’ignoble Mills et la relation ambiguë qu’il entretient avec son homme-chien. Cependant, on ressent clairement que des quatre personnages principaux, l'accent est surtout mis sur Helen, loyale et pleine d'empathie, une Mademoiselle-tout-le-monde, comme vous et moi. Son amitié pour Milena, puis son amour pour Milos, l'amènent à prendre des risques inédits, mais Helen reste le genre de personnage témoin des événements, de ceux qui les vivent au quotidien, non de ceux qui en sont à l'origine et qui agissent.
Milena et Bartolomeo en sont l'exact inverse, des personnages plus inaccessibles, emportés par leur combat, d'autant que la jeune fille est l'incarnation de cette Culture qui lutte pour exister, à travers sa voix extraordinaire qui lui vient de sa mère. Une grande place est donc accordée à la musique. D'ailleurs l'idée de l'évocation du pouvoir des mots et des notes sur les gens (des émotions qui les transportent et qui leur fait trouver la meilleure partie d'eux-mêmes) est une belle trouvaille. Un formidable message d'espoir où l'Art révèlerait la beauté humaine dans cette aventure sombre et fantastique, allégorie du combat de la Culture contre l'obscurantisme.
Cependant, "Le combat d'hiver" n'est pas exempt de défauts, qui n'entache en rien la qualité de l'œuvre, et qui sont, à mon humble avis, essentiellement dus aux fait que le livre soit un "one-shot". En effet, on peut regretter que Mourlevat n'aille pas plus loin dans l'exploration de son monde, à la frontière du fantastique et du réel. En mettant davantage l'accent sur les sentiments des adolescents que sur les descriptions et le déploiement de cet univers, on ne peut s'empêcher de ressentir, à certains moments, un manque, voire une légère déception.
Malgré ce léger point négatif, au final, "Le combat d'hiver" est un solide roman mené de main de maître par un très bon auteur, capable de mettre au monde des histoires plus surprenantes les unes que les autres !!!

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire