vendredi 19 avril 2013

Livre (Manga) - City Hall de Rémi Guérin et Guillaume Lapeyre

Rémi Guérin et Guillaume Lapeyre - City Hall : Un manga français au visuel léché et au scénario original !!!

Note : 4 / 5

Synopsis :
Un drame a eu lieu à City Hall : le ministre des finances a été tué. Très vite, l'inspecteur-chef Lester est sur le dossier. Il se rend compte que le crime a été commis de façon improbable. Sur le cadavre, un papier est découvert. Lester le saisit et, tout en le dissimulant sous son manteau, se rend chez le maire Malcolm Little. Ce dernier fait appel au romancier Jules Verne pour enquêter sur cette affaire.
Accompagné de son assistant Arthur Conan Doyle, l’écrivain a pour mission de retrouver le criminel. Le choix du maire énerve l'inspecteur, mais il le justifie par le fait que le papier a disparu depuis plusieurs décennies et qu'il fut longtemps utilisé comme support magique. Les écrivains les plus talentueux pouvaient ainsi laisser vagabonder leur imagination et créer des créatures aussi immenses que dangereuses. Pour Jules Verne et Arthur Conan Doyle, qui n'ont jamais connu l'utilisation du papier, débute une enquête où leur intelligence et leur talent seront mis en valeur.

Critique :
Ankama a montré depuis plusieurs années que les mangas pouvaient parfaitement venir de France ! Après "Debaser" (et sa rock attitude) et "Appt.44" (et son extra-terrestre caché au milieu d'une colocation), l'éditeur lance "City Hall". Les auteurs sont loin d'être des inconnus dans le 9ème art : Rémi Guérin (le scénariste) et Guillaume Lapeyre (le dessinateur) ont déjà œuvré sur de nombreuses séries.
"City Hall" est une création réellement originale. Et de plus, c'est un manga français, ce qui est assez rare pour être souligné vu les difficultés que les auteurs français rencontrent pour publier ce genre de projet. Un manga français donc. Et Ankama a mis le paquet pour que ça ne se voie pas. La maquette, la jaquette, le format, tout vous fera penser à la BD nippone.
Habitués en Neuvième Art, Rémi Guérin ("Kookaburra Universe", "Les Véritables légendes urbaines") et Guillaume Lapeyre ("Ether", "Les chroniques de Magon", …) n’en sont pas à leur première collaboration, puisque "Explorers" avait déjà été pour eux l’occasion d’un travail commun. L’occasion également de broder, déjà, sur les travaux de Jules Verne et d’Arthur Conan Doyle. C’est donc logique qu’on retrouve à présent en chair et en os ces deux personnages en héros de leur nouvelle œuvre.
"City Hall" se déroule dans un univers dépourvu de papier et dans lequel l’écriture manuscrite, interdite depuis des siècles, n’est plus enseignée. La raison en est simple, tout ce que vous écrivez prend vie. Devenu une arme trop dangereuse, le papier a été à l’origine d’une guerre d’ampleur planétaire destinée à l’éradiquer de la surface du globe qui dura près de deux cent ans.
Après quoi, ce monde a suivi un autre chemin que le nôtre et la technologie s’est développée plus rapidement que la Révolution Industrielle. Nous voici donc dans un environnement mécanique, prônant le travail à la chaîne comme une nouvelle méthode de rentabilité révolutionnaire, mais possédant déjà internet et des écrans LCD.
100% certifié français, "City Hall" n’en obéit pas moins scrupuleusement à tous les codes du manga, du format au style graphique en passant par la découpe des cases. Seule la lecture, de gauche à droite, échappe aux règles nippones du genre. Non content de mixer les cultures, "City Hall" mixe aussi les genres ! Empruntant son Londres victorien et ses mécanismes chuintants au courant steampunk, il y allie des auteurs, sinon classiques, tout du moins à l’image vieillissante auprès des jeunes générations, qu’il transforme en sorte de super-héros. Ne parlons pas de l’aviatrice Amelia Earhart soudainement dotée d’un décolleté plongeant et des plus sexy.
Des crimes sont commis à City Hall et tout indique que l'assassin serait un utilisateur de papier, chose impossible puisque cela fait normalement plusieurs centaines d'années que ce matériau a été détruit à cause de ses propriétés magiques. C'est alors que le maire confie à deux écrivains talentueux, Jules Verne et Arthur Conan Doyle, de stopper cette série de meurtres. L'imagination est évidemment au cœur de cet album.
Un lecteur assidu de manga trouvera peut-être qu'il y a des similitudes avec "Death Note". En effet, dans ce monde, écrire sur un cahier devient une arme. De plus, les deux héros de l'histoire pourront vous faire penser aux duels de cerveaux de "Death Note", notamment Conan Doyle (auteur de "Sherlock Holmes") qui est capable de trouver des indices un peu partout tout en restant méthodique et froid. Ils seront accompagnés par une charmante jeune fille chargée de les "protéger".
Ainsi, si le principe initial pourrait rappeler "Death Note", sans le côté sombre et sadique, "City Hall" se distingue néanmoins par une narration millimétrée. Rémi Guérin délivre un récit solide, un peu bavard par instants et spectaculaire à d'autres. Les personnages sont bien en place et disposent d'un caractère travaillé. Explosif et mené à toute allure, ce cocktail hétéroclite dépoussière avec humour les héros de notre Histoire. Loin du méli-mélo pâteux que cette réunion improbable aurait pu produire, le premier tome de "City Hall" frappe un grand coup grâce à son humour et son univers étonnant.
Guillaume Lapeyre rend lui aussi une très jolie performance avec un visuel très fin, détaillé et ambitieux. Côté dessin, là aussi, on emprunte allégrement aux codes du manga. Visages expressifs, trait fin qui ne s'attarde pas sur les détails mais qui a le mérite d'être très lisible. Sur la couverture, Jules Verne vous fera sans doute penser, là encore, à Light de "Death Note". Et c'est certainement voulu. Le découpage est ultra dynamique et ne laisse que peu de répit au lecteur alternant scènes d'action intensives et moments de réflexion plus calmes.
Au final, sous le trait assuré de Guillaume Lapeyre, et grâce aux talents de conteur de son compère, les héros de cette aventure londonienne prennent vie aussi sûrement qu’un papercut entre les mains de Lord Black Fowl. Si le scenario n’a guère le temps que de s’esquisser dans ce premier tome qui pose surtout les règles de son univers, nul doute que la suite saura vous tenir en haleine d’un bout à l’autre.
Ce manga est aussi frais et original que l’idée qui le fait vivre. A croire qu’il y a effectivement du Jules Verne là-dessous. C’est beau, un rien bavard, mais bien pensé et rythmé. Les auteurs s’amusent à ajouter des héros de renom face à un vilain rusé, insaisissable, et les pages défilent avec action et humour !!!

1 commentaire: