jeudi 25 juillet 2013

Livre (BD) - Scotland Yard, Au coeur des ténèbres T1 de Dobbs et Stéphane Perger

Dobbs et Stéphane Perger - Scotland Yard, T1, Au cœur des ténèbres : Un album efficace et bien ficelé !!!

Note : 4 / 5

Synopsis :
Londres, 1890. L’inspecteur Tobias Gregson est une des valeurs montantes du Yard. Mais sa carrière serait accélérée s’il n’était pas considéré comme un humaniste trop sensible et avant-gardiste, et surtout s’il n’avait pas pour fonction principale d’être le défouloir quotidien de son supérieur Lestrade.
Alors lorsqu’un transfert de prisonniers ne se passe pas comme prévu, Gregson se retrouve au placard. Un blâme qui va vite se transformer en opportunité afin de démontrer sa vraie valeur aux yeux du patron des patrons, le commissionner Fix. À la tête d’une équipe atypique réunissant un gamin des rues, ancien informateur de Sherlock Holmes, un médecin psychiatre aux méthodes atypiques ainsi que son étrange assistante, Gregson va faire alliance avec le diable : coopérer avec la pègre londonienne pour traquer deux fous extrêmement dangereux qui ont profité du fiasco de l’opération de transfert pour se volatiliser. Deux aliénés mentaux qui vont apprendre aux citoyens de Londres la signification du mot terreur.

Critique :
Dobbs, alias Olivier Dobremel, semble avoir pris un abonnement au sein de la collection 1800 de Soleil, car il a également scénarisé le diptyque "Mister Hyde contre Frankenstein" ainsi "qu’Allan Quatermain et les mines du roi Salomon". Pour rappel, Jean-Luc Istin dirige cette collection, qui joue sur les atmosphères et les personnages fétiches du XIXe Siècle. Même si les albums se concentrent plus particulièrement sur la fin du siècle, on prend globalement beaucoup de plaisir à se plonger dans des récits fantastiques et innovants.
Comme le titre n'en fait pas vraiment mystère, "Scotland Yard, Au cœur des ténèbres", il scénarise ici un nouveau diptyque satisfaisant aux canons du thriller victorien, option crimes sordides et tueurs psychopathes. Le héros est en effet un inspecteur de Scotland Yard déchu, qui intègre une cellule d'investigations aux méthodes un brin décalées. Leur enquête va chercher à neutraliser deux meurtriers déments récemment évadés, le plus rapidement possible car les cadavres s'accumulent.
Ce nouveau diptyque adhère totalement aux principes de la collection 1800. On retrouve dans le rôle de "déclencheur" une personnalité importante de la période, l’auteur Bram Stoker, et y croise moult figures fictives de l’ère victorienne, dans des rôles plus ou moins importants (le récit s’ouvre d’ailleurs sur l’exécution de Mary Pearcey, une criminelle, coupable de crime passionnel, qui fut soupçonnée d’être Jack l’éventreur).
L’histoire se déroulant au sein des arcanes de Scotland Yard, il est donc normal d’y rencontrer les personnages principaux des romans de Sir Arthur Conan Doyle, ou de les voir citer (comme Moriarty ou Sherlock Holmes). D’autres personnalités romanesques figurent cependant en bonne place, comme le docteur Seward, qui aide l’inspecteur Gregson dans son enquête, et Reinfeld, l’un des deux dangereux psychopathes.
Dobbs monte encore en puissance avec ce récit glauque qui mêle des personnages des romans de "Dracula", "Frankenstein" et "Sherlock Holmes" à de figures historiques, tout en se lançant dans une étude des tueurs en série. On se rappelle effectivement que Dobbs avait scénarisé avec beaucoup de réussite deux albums de la collection Tueurs en série, parvenant à percer la carapace de ces psychologies anormales.
Ainsi, la bonne idée de Dobbs est de convoquer pour ce premier tome différents seconds couteaux de la mythologie victorienne, en évitant astucieusement de recourir aux cadors du registre (Sherlock Holmes, Jack l'éventreur...). Et comme s'il cherchait à consolider son petit univers, Dobbs redonne également un rôle important à la psychiatre Faustine Clerval, personnage central de son récent "Mister Hyde contre Frankenstein". 
Pur thriller victorien, ce premier opus se laisse très facilement lire et s’accommode bien de la multitude de ses influences et de ses clins d’œil grâce à une intrigue plutôt bien ficelée. Dobbs fait ici mieux qu’à l’occasion de ses précédents essais dans le style. L’histoire souffre cependant du même défaut : une certaine distanciation qui fait qu’aucun des protagonistes n’est attachant. On se moque totalement du sort de l’inspecteur Gregson, et les aventures vécues par le docteur Seward et sa jolie assistante nous laissent froid.
L'autre bonne idée, c'est de s'appuyer sur les talents artistiques de Stéphane Perger, dont l'exquis lavis et les superbes aquarelles semblent avoir été précisément mis au point pour dessiner les bas-fonds londoniens et leur glauquitude. A partir de savantes ambiances de couleurs, Perger restitue les blancs comme personne et utilise à merveille l'humidité de ses pinceaux pour créer des effets éthérés angoissants, des "accidents" de reflets somptueux.
Côté colorisation, Stéphane Perger utilise la technique de la "couleur directe" (la couleur et les tracés de contour noir ne sont pas séparés). Il joue aussi beaucoup avec les ombres et les lumières permettant de donner du volume, par exemple aux vêtements mais aussi d’accentuer les expressions des visages de chaque personnage, notamment celles de Carfax, qui font parfois froid dans le dos.
Le découpage des planches est dynamique avec des cases de diverses tailles parfois superposées sur des illustrations pleines pages, ce qui donne visuellement des actions rythmées. Nul doute, Stéphane Perger est un très bon dessinateur et coloriste. On peut ne pas apprécier le style couleur directe, mais force est d’admettre qu'ici, générant moult ombres et reflets inquiétants, cela colle parfaitement à l’ambiance glauque du récit.
Au final, en découvrant ce premier tome, on s’aperçoit très vite que Dobbs et Stéphane Perger forment un duo de choc en nous servant une histoire qui retient très vite l’attention que ce soit au niveau du scénario que du graphisme. Un tome très efficace que ce "Scotland Yard, Au cœur des ténèbres". S’il souffre d’une absence de personnages attachants, il bénéficie d’une intrigue bien ficelée se déroulant dans une ambiance victorienne bien rendue. Le choix de traitement de Stephane Perger n’est pas étranger à la bonne impression ressentie à la lecture de cet ouvrage. Du bon travail au sein d'une collection qui ne cesse de se bonifier !!!

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