Note : 3.75 / 5
Synopsis :
Au début des années 80, abandonnant une carrière d’avocat prometteuse,
Pierre Durand se consacre corps et âme à sa passion, le saut d’obstacle.
Soutenu par son père, il mise tout sur un jeune cheval auquel personne
ne croit vraiment : Jappeloup.
Trop petit, trop caractériel, trop
imprévisible, il a de nombreux défauts mais une détente et des aptitudes
remarquables. De compétition en compétition, le duo progresse et
s’impose dans le monde de l’équitation. Mais les JO de Los Angeles sont
un terrible échec et Pierre prend alors conscience de ses faiblesses.
Avec l’aide de Nadia, sa femme, et de Raphaëlle, la groom du cheval,
Pierre va regagner la confiance de Jappeloup et construire une relation
qui va les mener aux JO de Séoul en 1988.
Critique :
Quelques semaines seulement après "Turf" de Fabien Onteniente, voici
que débarque sur nos écrans un nouveau long-métrage se déroulant dans le
milieu équestre. Mais si les chevaux ont la côte, il n’est, cette
fois-ci, plus question de comédie.
S’intéressant à l’histoire vraie de
Pierre Durand, jeune homme destiné à un grand avenir d’avocat, qui
plaque tout pour revenir à sa première passion, le saut d’obstacle, "Jappeloup" est également la chronique d’une famille qui a décidé de
tout sacrifier pour permettre la réussite d'un fils. Et pour mettre en
boîte cette histoire, c’est le réalisateur Christian
Duguay, plutôt habitué aux séries B et aux gros muscles ("L'art de la guerre", "Suffer Island"), qui a été
désigné. Projet atypique, le film est une plongée spectaculaire dans
l’univers des grands concours équestres, entre intimité et grand
spectacle.
On connaît tous plus ou
moins le destin sportif de Pierre Durand, dont le sacre olympique dans
la discipline du saut d’obstacles à Séoul en 1988 constitue le point
d'orgue de ce biopic qui vaut moins par son final fédérateur que par le
parcours humain du bonhomme. Le film met notamment en relief sa relation
complexe avec son père (Daniel Auteuil, dans l'un de ces rôles empathiques
dont il a le secret), ses emportements d’enfant gâté, son entêtement
confinant à la bêtise, ses manières de putschiste (il fit virer Jacques
Rozier, le capitaine de l’équipe de France d’équitation).
Si le film évite l’overdose de bons sentiments, c’est en
particulier grâce à un scénario très bien ficelé. Refusant l’idolâtrie
et la contemplation, le film n’a pas peur de montrer un futur héros
national empli de failles, aussi antipathique qu’il peut être touchant.
Guillaume Canet, également scénariste, excelle dans un rôle taillé pour
lui, offrant aux spectateurs une palette d’émotions extrêmement variées. Canet, qui fut cavalier de haut niveau, n’occulte
aucune zone d’ombre du personnage et laisse le soin à Christian Duguay,
talentueux réalisateur canadien qui monte également, de mettre en scène
les moments-clés avec une certaine maestria.
De l’habile montage
parallèle du début à la première rencontre, sans paroles et
d'anthologie, entre Durand (Canet) et Rozier (Karyo), en passant par
toutes les scènes de compétitions et d’intimité que partagent Durand et
sa femme, il y a une adéquation parfaite entre la forme, ambitieuse, et
le fond, assez compact. Cependant à côté de Canet, le reste du casting ne déçoit pas non plus. Tous
sont à leur meilleur niveau, en particulier Daniel Auteuil, en père
aimant et attentionné, dont le charisme explose une fois de plus à
l’écran.
Peinture familiale, le métrage est également l’incroyable
histoire d’un cheval en qui personne ne voulait croire, celui-là même
qui donne son nom au projet. Pour pouvoir l’apprivoiser, Pierre Durand
va devoir multiplier les efforts, ne faire plus qu’un avec sa monture. S’installe alors une danse entre les deux, leurs corps se confondant
dans une parade intelligemment filmée. Malgré le rythme soutenu, le
réalisateur prend, en effet, le temps de s’attarder sur ces petits
moments anecdotiques qui construisent les grandes épopées.
Et malgré tout, c'est peut-être là le réel défaut de ce très bon "Jappeloup". Si le film est intéressant, même plus intéressant que prévu pour ceux
qui ne sont pas fans d'équitation, il traîne en longueur,
particulièrement au milieu du film. Les échecs du jeune cavalier
s'enchaînent et nous font nous demander s'il y arrivera un jour. En
effet, les films sur les chevaux font rarement l'unanimité mais celui-ci n'est en aucun cas soporifique.
La mise en scène de Christian Duguay y est sans doute pour quelque chose. L'investissement de Guillaume Canet aussi, tant sa passion des chevaux se fait sentir. Ce dernier allant même jusqu'à reprendre l’entraînement, à faire
insérer des images d’archives personnelles et à caster Marina Hands
(formidable), son amour de jeunesse, rencontrée dans les paddocks.
"Jappeloup", c’est aussi son histoire.
Au final, Guillaume Canet, qui a, en langage équestre, une bonne assiette aux yeux
des producteurs, n’a pas reculé, et signe un film qui a du panache et
vous emmène direct à Séoul. Scénariste et acteur, il a marié le
caractère difficile du cavalier et celui du cheval. Ce film tient aussi
par ses acteurs (Marina Hands, Daniel Auteuil dans le rôle du père,
Jacques Higelin impeccable en éleveur,…) et par un récit aussi épique
qu’hippique. Surtout, "Jappeloup" est un film qui célèbre, sans en
gommer les aspérités, la ténacité et le désir. Beau parcours, vraiment !!!
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