Note : 4 / 5
L'annonce de la réunion de Black Sabbath dans sa formation originale en 2011 était déjà un évènement en soi. Malgré la défection entre temps de Bill Ward qui s'estimait lésé contractuellement par ses acolytes, le diagnostic du cancer de Tommy Iommi et la voix hésitante d'Ozzy Osbourne lors des concerts de 2012, la sortie de "13" vient concrétiser le grand retour des créateurs de la face sombre du heavy metal. Black Sabbath vient
tout simplement de réussir ce sur quoi la plupart des reformations
plus ou moins éphémères des grands groupes du rock ont échoué, produire
un album digne de leur âge d'or.
"Imaginez un peu les gars. Vous êtes en 1970, vous venez d'enregistrer
votre premier album. Qu'est-ce que vous faites après ?" C'est à peu près
en ces termes que le producteur Rick Rubin a entamé les sessions
d'enregistrement de "13", le nouvel album de Black Sabbath, avec
trois de ses membres d'origine, le chanteur Ozzy Osbourne, 64 ans, le
guitariste Tony Iommi, 65 ans, et le bassiste Geezer Butler, 63 ans.
Il s'agit donc sans doute d'une des reformations les plus
attendues de l'histoire du métal, régulièrement espérée depuis le départ
d'Ozzy, il y a 35 ans ("Never Say Die!" 1978). L'une des plus légitimes aussi tant l'empreinte
du groupe de Birmingham, ses quatre premiers disques en particulier,
est évidente sur à peu près 99% des albums de métal, d'hier et
d'aujourd'hui. Sans des titres mythiques comme "Iron Man", "Paranoid",
"War Pigs" ou "NIB", pas de Metallica, pas de Slipknot, pas d'Alice in Chains, pas de Melvins ou de Marilyn Manson non plus.
"Is it the end of the begining or the begining of the end", la première phrase lâchée par Ozzy sur "End of the begining",
le premier titre de l'album, résume à elle toute seule l'état d'esprit
dans lequel ce disque a été pondu. On ne sait pas s'il y aura un
successeur à l'album, ou si le groupe est reparti sur des bases solides,
mais une chose est sûre: il se passe quelque chose !
Pour ceux qui auraient encore des craintes sur le sujet, Sabbath reste Sabbath. On reconnaît ainsi sans peine la signature du groupe : guitares grasses et massives d'un Iommi dont
le jeu, pour notre plus grand bonheur, accroche et "raccroche"
toujours autant (tout comme il dégouline toujours de classe et de
feeling sur les soli et autres arpèges mélancoliques), toujours appuyé par la basse volubile de Geezer Butler qui
reste inégalable dans son propre domaine, même lorsqu'elle se retrouve
mixée un peu plus en retrait par rapport au chant et aux guitares et enfin les lignes vocales
geignardes, incantatoires ou plus vindicatives du Sieur Osbourne.
Pour ce retour en fanfare, Black Sabbath privilégie la concision avec seulement huit titres sur la version standard de "13".
Quatre autres pistes viennent s'ajouter à l'album original par le biais
des différentes éditions spéciales. L'esprit est là et bien là, à tel
point qu'on se demande si les huit chansons de "13" ne sont pas des
compositions qui dormaient dans un grimoire oublié depuis 1975. Tout y
passe, les ambiances lourdes, les rires déments, les chorus ravageurs
d'un Tommy Iommi grandiose, l'odeur du souffre qui imprègne les cinquante-trois minutes et trente-six secondes que dure le disque.
Ainsi un dix-neuvième opus studio pour ce légendaire combo de heavy metal Anglais,
né en 1969, et, originaire de Birmigham. Dès l'entame, avec "End Of The Beginning",
on reconnait le style bien heavy des accords assénés par Tony. Puis,
l'ambiance se fait plus soft, et, angoissante. Ozzy entre en scène avec
sa voix nasillarde. Puis, arrive une accélération, façon "Under The Sun",
et un chorus bien chaud où Tony Iommi fait hurler sa Gibson.
Même
approche sur "God Is Dead", avec son climat pesant, et son chorus aérien. Toujours aussi heavy, il y a, encore, "Dear Father", parsemé par les breaks de Brad Wilk (Rage Against The Machine/ Audioslave), et, qui se termine avec la pluie, l'orage et le tocsin. En plus enlevé, on trouve "Loner" où Tony nous sert un chorus ensorcelant, mais, aussi, "Age Of Reason" avec son riff qui bourdonne, genre "Into The Void", ou, encore, "Damaged Soul", aux riffs bien bluesy sublimé par l'harmonica d'Ozzy et la basse de Geezer.
Dépourvu de temps faible, "13" accumule au contraire les morceaux épiques. Dévoilé en avant-première en avril, "God Is Dead ?" n'était donc pas un leurre. "Zitgeist", "End of the Beginning", et "Live Forever" l'accompagnent sur la route pavée de mauvaises intentions des classiques de Black Sabbath. La différence entre "13"
et la majorité des albums de reformations semble être d'avoir un but
artistique au-delà du simple fait de raviver la flamme des fans. En
terminant le disque par les mêmes bruits d'orage et de cloches lointaines
qui ouvraient "Black Sabbath" (1970) il y a quarante-trois ans, le groupe semble signifier que l'histoire se referme définitivement avec "Dear Father".
Seul bémol ? Le jeu du batteur de Rage Against The Machine,
Brad Wilk, solide mais bien moins créatif que celui du bon vieux Bill
Ward. Son absence n'empêchera pas les fans de célébrer cette messe noire
musicale qui se prolongera sur scène dans les mois qui viennent. Escale
parisienne le 2 décembre prochain, à Bercy.
Au final, réussir son retour était déjà inespéré, soigner ainsi sa sortie est tout simplement exceptionnel et fait pour toujours de Black Sabbath un groupe définitivement à part. "13" ranime des frissons que l'on croyait à jamais oubliés, devenant l'ultime ensorcellement du heavy metal le plus occulte.
Avec "13", Black Sabbath
signe donc ici un retour tonitruant qui mettra toute la planète rock
sur la même longueur d'onde. En nous donnant une véritable leçon
d'efficacité, ces papy du hard rock nous balancent ici un must have, ni
plus, ni moins !!!
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