Note : 4 / 5
Synopsis :
Journaliste et copropriétaire du magazine Millenium,
Mikael Blomkvist déteste ce surnom qu’il a glané en offrant plusieurs
articles d’investigations qui ont fait grand bruit. Celui de "Super
Blomkvist". D’autant qu’en ce matin suédois frileux, devant le parterre
de confrères qui lui tendent leur micro à la sortie du tribunal, il ne
sent pas "Super" pour deux sous. Il vient en effet d’écoper d’une
amende de 300 000 couronnes et de 3 mois de prison pour diffamation
aggravée. Et ce, en raison d’un article accusant Hans-Erik Winnerström
de détournement de biens sociaux.
Le pire pour lui dans tout ça est de
voir Winnerström partir du tribunal totalement innocenté. Rapidement,
pour que son journal ne soit pas une des victimes collatérales de la
condamnation, Blomkvist décide de démissionner. Il en fait l’annonce le
soir même à son associée et maîtresse, Erika Berger, lors de fougueux
ébats. Un sympathique divertissement bientôt interrompu par l’appel de
l’avocat d’Henrik Vanger, un homme d’affaires puissant. Via l’agence
Milton Security et en particulier de l’une de ses employées Lisbeth
Salander, l’avocat sait que Blomkvist est l’homme de la situation.
Aussi
l’invite-t-il à rencontrer Vanger dans sa propriété d’Hedeby, pour
qu’il lui expose la mission qu’il souhaite lui confier. Et de fait, dès
le lendemain, Blomkvist est mis au parfum : Vanger souhaite qu’il
enquête sur la disparition de sa nièce, Harriet, dont il est sans
nouvelle depuis plus de 40 ans. Fugue, assassinat ? La police n’a jamais
eu la moindre piste. Pourtant, depuis plus de 40 ans, pour son
anniversaire, le vieil homme reçoit une fleur séchée encadrée.
Exactement comme celle que lui offrait sa nièce avant sa disparition.
Critique :
A l’origine, "Millenium" est une trilogie de romans
policiers du journaliste et écrivain suédois Stieg Larsson décédé avant la
publication de ces livres. Publiée en Suède de juillet 2005 à mai 2007, cette
saga titrée "Millenium", dans les éditions en suédois et dans
diverses autres langues a obtenu un succès planétaire avec plus de 50 millions
d'exemplaires vendus à l’heure d’aujourd’hui. Après des adaptations au cinéma version suédoise et une
version américaine avec Daniel Craig, "Millenium" débarque en BD aux éditions
Dupuis sous la houlette des auteurs Sylvain Runberg et Josep Homs pour les deux
premiers tomes.
Au départ, on voit "adaptation BD de Millenium", et on
grimace un peu. Les adaptations de roman en bande dessinée sont
nombreuses ces dernières années, et la déception est parfois grande tant
l’exercice est difficile. Car transposer une œuvre d’un média, le
roman, à un autre, la BD, implique un autre rythme, une narration
différente, mais aussi de mettre concrètement en images ce qui n’était
que des mots.
Pour "Millenium", en plus, il y a le fait qu’il y a
déjà eu deux adaptations (la série suédoise, et le film américain) et
qu’on voit suspicieusement venir le titre commercial qui voudrait surfer
sur le succès de la franchise. Oui mais je vous arrête tout de suite, on aurait vraiment tort de penser ça du "Millenium" que nous offre Runberg et Homs.
Succès éditorial, télévisuel et cinématographique colossal, la fabuleuse trilogie du suédois Stieg Larsson
s’offre aux talents conjugués de Sylvain Runberg (scénariste français résidant à Stockholm) et José Homs pour une
excellente adaptation en bande-dessinée. Confié à un suspens policier à
tiroirs et sellé par la force d’attraction de ses protagonistes
principaux, chaque opus de la trilogie originelle sera traité en deux
tomes.
Que l’on ait lu ou pas les romans de Stieg Larsson, que l’on ait vu les films ou non, le plaisir sera au rendez-vous. Le duo a réussi le tour de force de réinventer "Millenium", sans jamais le dénaturer.
C’est la même histoire et pourtant, c’est différent. Sylvain Runberg,
le scénariste, a retravaillé le roman de telle manière qu’il nous
propose de regarder chaque évènement, chaque détail, sous un angle
différent. Et Homs, dessinateur incroyablement talentueux, allie une
mise en scène impeccable à un dessin sublime (et la colorisation est
superbe elle aussi). Le rythme du roman était lent, ici la tension
grimpe à chaque page. La part belle est faite à la Suède, véritable
personnage de l’histoire. Les héros, eux, n’ont rien perdu en
personnalité, et cette Lisbeth-là concurrence sans problème Noomi Rapace question charisme.
Pour cette première immersion en terre
suédoise, on se laissera immédiatement prendre par la mécanique du
récit. Pour fil rouge, l’intrigue se gorge en effet d’une enquête sur la
disparation, 44 années plus tôt, d’Harriet Vanger, héritière d’une
famille au passé nauséeux. Enquête qui sera menée dans le huis-clos
d’une île par un journaliste à succès en disgrâce, Mikael Blomkvist. Le patriarche de la
famille Vanger lui promet ainsi de le réhabiliter grâce à quelques
juteuses informations, si toutefois il résout l’énigme de cette
disparition.
On suivra également avec attention, dans le même mouvement,
le tumulte de l’existence de Lisbeth Salander dont les connexions avec
Blomkvist sont pour l’heure à peine filigranées, mais dont le personnage
ne manque pas immédiatement d’interpeler. Rien à redire sur le plan de
l’adaptation ! Les coupes nécessaires pour une lecture dans ce nouveau
format sont en effet judicieusement choisies pour garder la
substantifique moelle du récit. Surtout, le rythme en tension, alimenté
par un impeccable découpage, des rebondissements pointus et
d’énigmatiques visions d’horreurs, agrippe avec force dès la lecture
entamée. Et ce quand bien même on connait déjà, pour les avoir lus ou vus,
les tenants et les aboutissants du récit.
Cette adaptation est donc une pure merveille. Le scénario, on le connaît, est très riche et son intrigue et ses personnages ne peuvent vous
laisser indifférent. Mais ce qui est frappant dans avec cette BD, c’est l’alchimie entre le
scénario et un graphisme franchement brillant. Le dessinateur Homs recrée avec
brio l’ambiance sombre, angoissante, parfois suffocante ou malsaine de
"Millenium". On retrouve ces personnages qui frappent, qui cognent et qui vous
laissent sur le carreau. Un franc bravo à Homs, sa partition fait de ce
premier opus une pure réussite.
Cette mise en bouche est donc plus que
satisfaisante, parfaitement rythmée, dense et tisonnant furieusement la
future association de Blomkvist et Salander. José Homs se saisit quant à
lui brillamment de cette adaptation, grâce à un dessin élégant et on ne
peut mieux cadré. On aime aussi sa mise en couleurs, qui assume
parfaitement la charge émotionnelle du récit. Enfin il garde aussi
l’intelligence de ne pas s’éloigner radicalement des images
cinématographiques imprimées malgré nous dans un coin de notre cerveau,
tout en offrant sa propre personnalité.
Fans des romans ou simplement amateurs de polar, ruez-vous sur cette
merveille ! Runberg et Homs sont allés bien au-delà de la
simple adaptation, et nous livrent un vrai petit bijou, sombre et lumineux à la fois, qui n’aurait, à coup sûr, pas déplu à feu Stieg Larsson.
Au final, cette première adaptation en BD ne surfe pas uniquement sur l’effet de
mode mais montre à quel point l’intrigue de la saga colle à celle du
genre. L’action, le suspense, l’angoisse, tout est là, et c’est un
régal. Les choix graphiques de Josep Homs sont très convaincants,
l’auteur ayant par ailleurs un art certain de la mise en scène, apte à
captiver le lecteur. Au scénario, Sylvain Runberg trouve le juste
équilibre entre une adaptation fidèle et la retranscription d’une
ambiance suédoise qu’il connait bien.
En d’autres termes, on ne s’ennuie
pas une seconde et on prend un plaisir fou à redécouvrir une histoire
qu’on connaît pourtant par cœur. C’est là un joli tour de force !!!
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