Note : 4 / 5
Révélation pop américaine de 2009 avec la sortie du délicat "Gorilla Manor", les Local Natives
étaient un groupe dont on guettait avec impatience le retour. Après
l’agitation autour d’un premier album au succès aussi bien mérité
qu’inattendu, une longue tournée,
le départ d’un bassiste et un peu de remise en question, il aura fallu trois ans aux Californiens pour préparer ce deuxième album tant
attendu.
On connaît l’influence que peuvent avoir sur un jeune groupe à
l’identité encore oscillante des musiciens déjà installés. Elle est
d’autant plus grande lorsque ceux-ci invitent leurs petits protégés à
assurer les premières parties de leurs concerts. Invités en tournée par deux de leurs aînés, Arcade Fire et The
National, rien que ça, les geeks californiens en sont revenus quelques
peu transformés. Impossible de rester indifférent au son massif des
Canadiens, ni à la précision des New-Yorkais, dont les Local Natives ont
d’ailleurs kidnappé le guitariste et claviériste, Aaron Dessner, pour
assurer la production de leur second album, "Hummingbird".
Il y a quelque chose de sanguin dans le nouvel opus des Local Natives.
Non dans le sens sanguinaire du terme, mais plutôt
pour son côté impulsif, dans sa capacité à saisir chez celui qui
l’écoute le moindre globule pour le retourner ou l’animer. Dès qu’il est ouvert, l’album donne avec le titre "You and I", la tonalité sombre qui perdurera jusqu’au onzième et dernier morceau.
"You and I" est
un morceau qui se construit lentement, comme s’il laissait le soin à un
amant imaginaire de délier avec tendresse les lacets de son corset.
Puis la guitare s’anime quelque peu, les percussions deviennent
hypnotiques et la voix de Kelcey Ayer, magnifiquement emphatique, vient
donner une profondeur miraculeuse à la chanson.
Le premier single "d’Hummingbird", "Breakers", avec son
instrumentation scindée en multi-couches harmonieuses, est menée par des
riffs de guitare jangle pop tout simplement phénoménales. La vivacité
et l’énergie qu’ils avaient donné à "Gorilla Manor", se retrouve
ici mais disparait dans la majeure partie de l’enregistrement. Les
chœurs du refrain sont terriblement "infectieux", tant il demande à
être réécouté en boucle. Ne vous étonnez pas de fredonner des
"ouh-ouh" en écoutant ce titre, il a été conçu pour ça.
L’ensemble de
l’album est un patchwork d’influences. Celle de The National
en premier lieu, non seulement du fait que l’album ait été produit
par Aaron Dessner, mais également pour ce côté mélancolique propre au
groupe originaire de Cincinnati. Le balancement des chœurs propres à
ceux de Grizzly Bear, la voix et les roulements mélodiques rappelant Fleet Foxes, il y a quelques éléments propres aux grands groupes indies des dernières années. Pourtant, l’on sent dans "Hummingbird", que les Local Natives ne
se révèlent pas comme étant les simples héritiers copistes d’un genre,
mais semblent au contraire prendre une voie nouvelle au carrefour des
sempiternelles réécritures indies.

Habile est le maitre mot de ce nouvel album et de sa construction.
Car la majorité de celui-ci nous fait dire que "Hummingbird" est la
suite de "Gorilla Manor". Cependant, à force d’écoute et
d’approfondissement de ce dernier LP, on remarquera que le groupe y a
glissé de vraies nouveautés.
"Black Spot" et "Three Months"
sont les titres qui incarnent vraiment la nouvelle voie qu’a décidé
d’emprunter Local Natives. Le groupe n’a pas décidé de changé de style,
loin de là, mais de tenter de nouvelles choses tout en ne s’éloignant
pas trop du chemin tracé par leur première galette. Pour preuve, les
américains ne mettent jamais à l’écart l’appui
rythmique de la batterie de Matt Frazier.
Le groupe sort de sa zone de confort tout en préservant cette folk riche en harmonies
délicates. La finesse des arrangements font beaucoup pour la réussite de cet album et les chœurs
aériens aussi. Local Natives c’est pur, innocent. Quelqu’un, quelque
chose de fragile, délicat et mélancolique.
Local Natives évolue, explore de nouveaux horizons, mais maintient le
cap et garde la fraicheur qu’on lui connait. Que dire d’ailleurs de la
fraicheur de "Black Ballons" ou "Wooly Mammoth" ? Le
rythme, les voix, la mélodie. Tout y est. Ce que l’on attendait du quatuor, ce n’était pas que le groupe nous offre un album qui ressemble
à "Gorilla Manor". Ce que tout le monde souhaitait, c’est que Local
Natives confirme. Quoi de plus fort que de faire évoluer sa musique
tout en gardant les bases qui ont fait le succès du groupe !

"Hummingbird" confirme que les Californiens sont avant
tout des orfèvres aux cerveaux bouillonnants capables de bâtir des
chansons qui en contiennent chacune cent ("Breakers", "Heavy Feet"). Une chose est certaine, les quatre gars de Local Natives sont bourrés de talent et n’ont pas fini de nous éblouir !!!
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